Histoire du Jeu de Go
Le jeu de Go est un jeu de stratégie combinatoire abstrait très ancien, le plus ancien connu à ce jour. Il s'agit également d'un des jeux de plateau les plus joués dans le monde.
Origines
Certaines légendes racontent qu'il fut inventé en Chine environ 2000 ans avant Jésus-Christ. De nos jours, il se joue essentiellement en Chine (où il est appelé wei-ch'i), en Corée (baduk ou paduk), et au Japon (où il se nomme Go ou igo), ce dernier pays ayant été celui qui a œuvré le plus dans sa diffusion.
Récemment, le Go a retrouvé une certaine popularité auprès des jeunes grâce au manga Hikaru No Go, et Internet lui a donné un nouveau souffle. La notoriété du Go s'est constamment accrue au cours des dernières décennies. Son succès semble tenir à la simplicité de ses règles, à une grande richesse de jeu et à des situations stratégiques et tactiques toujours renouvelées.
La naissance d'un art
Certains attribuent l'invention du Go à l'empereur Yao ou à l'empereur Shun, mais toujours dans le but de contribuer à l'éducation de leur fils. D'autres en attribuent l'invention à un vassal nommé U, qui l'aurait imaginé pour distraire son suzerain Ketsu au cours du XVIIIe siècle avant notre ère. Ce qui est sûr c'est que les premières traces écrites remontent au 8ème siècle avant JC.
Une diffusion rapide sur l'archipel nippon
Le Go fut introduit en Corée au Ve siècle et s'étendit enfin au Japon au VIIe siècle, où il fut très vite adopté par la noblesse, très influencée par la Chine. Les nobles s'arrogèrent le droit d'y jouer, tout en l'interdisant aux moines dans le code civil de 701.
Longtemps confinée dans la sphère aristocratique, la pratique du Go s'étendit, au cours de l'ère Edo (1603-1867), aux bonzes et aux samouraïs, à titre d'entraînement à la stratégie militaire. Les moines Nichiren créent alors la toute première école de Go japonaise : l'école Honinbo.
Quatre grandes écoles de Go furent ainsi fondées sur l'archipel nippon au cours du XVIIIe siècle, et donnèrent naissance au système de classification toujours utilisé de nos jours.
Ainsi, le titre de « Meijin » ou Maître de Go du Shogun, l'un des titres les plus enviés, vient du 4ème directeur de l'école Honinbo, Meijin Dosaku, considéré par beaucoup comme l'un des plus grands joueurs de tous les temps. Même si seules 153 de ses parties ont été conservées, il est entré dans l'Histoire comme le plus grand théoricien du Go.
L'apogée d'une puissance
Cette professionnalisation a élevé le niveau de jeu japonais bien au-dessus de celui pratiqué en Chine à cette époque. Parallèlement, la fabrication du matériel atteindra des sommets de sophistication. Un plateau à base de bois de Kaya vieux de 700 ans, des pierres noires en ardoise et des pierres blanches en nacre conservées dans des bols en bois de mûrier : tout concourt à faire de ces objets des œuvres d'art à la hauteur de ce jeu considéré comme divin. Un jeu moderne d'une qualité comparable peut coûter actuellement près de 150 000 euros.
Même la fin des partenariats étatiques survenue après la révolution Meiji de 1868 ne ternit pas la domination nippone sur le jeu de Go, des partenaires privés ayant pris le relais. C'est ainsi que de nombreux professionnels japonais continuèrent à dominer le monde du Go jusqu'au début du XXe siècle.
Du déclin du go japonais...
Les années 1930 mirent fin à l'hégémonie japonaise sur le monde du Go. La défaite prit le visage d'un jeune prodige chinois découvert en 1926, à l'âge de 12 ans, Wu Qing Yuan. Il régna en maître sur le Go asiatique (et donc mondial) durant plus de 20 ans, devenant ainsi le symbole d'une renaissance du Go chinois au cours de la deuxième moitié du XXe siècle.
En effet, malgré les ravages de la Révolution culturelle, plusieurs joueurs de l'Empire du milieu firent montre d'une technique supérieure à celle de leurs homologues japonais. Dans les années 1980, les victoires chinoises devinrent de plus en plus nombreuses, à tel point qu'en 1996 une série de rencontres dut être annulée pour éviter un résultat trop embarrassant pour le Japon.
... à la naissance d'un nouveau dragon
Aujourd'hui cependant, le phénomène qui retient l'attention du monde du Go est l'ascension fulgurante d'un nouveau pays, longtemps considéré par ses deux puissants voisins comme un adversaire négligeable : la Corée du Sud. Les exploits de joueurs coréens tels Cho Chik-un, qui détint simultanément les 4 plus grands titres japonais en 1983, ou Choo Hoon-Hyun, actuel numéro 3 mondial, se voient éclipsés par l'élève de ce dernier, le Coréen Lee Chang-Ho. Lee Chang-Ho domine le Go mondial et détient 5 des 7 plus grands titres internationaux masculins, avec des gains annuels proches du million de dollars.
Pour preuve de cette nouvelle domination, depuis 1988, la Corée a remporté 41 des 54 plus grands tournois internationaux, contre 10 pour le Japon et seulement 3 pour la Chine.
Une expansion européenne, puis mondiale
C'est à partir du XVIIIe siècle, grâce aux récits des voyageurs, que le Go fut connu en Europe. Le Go se développa tout d'abord en Allemagne et en Autriche-Hongrie, à partir de la fin du XIXe siècle. Le premier club européen fut créé en 1895 par des marins austro-hongrois.
Le Go s'est réellement répandu dans le monde entier après la fin de la seconde guerre mondiale. Aujourd'hui, on dénombrerait plus de 50 millions de joueurs dans le monde. La moitié sont des chinois, un tiers des coréens et le reste essentiellement des japonais; on évalue à 1 million le nombre de joueurs en Europe.